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Mercredi, 7 novembre, 2018 à 13:35 Dakar – La main tendue du Maroc à l’Algérie pour sortir de la situation du blocage sur le dossier du Sahara marocain offre une réelle opportunité pour l’Afrique, a assuré le directeur du think tank africain “Timbuktu Institute”, Bakary Sambe. “Voir le Maroc et l’Algérie cheminer ensemble pour sortir de ce blocage est une réelle opportunité pour l’Afrique qui traverse des crises devant mobiliser toutes les énergies”, a-t-il déclaré à la MAP-Dakar, en réaction au discours royal adressé mardi soir à la Nation à l’occasion de la célébration du 43è anniversaire de la Marche Verte. Selon M. Sambe, le mécanisme politique conjoint de dialogue et de concertation que propose le Souverain peut être “une nouvelle chance pour l’unité africaine”, préoccupation constante du Royaume qui y a joué un rôle historique avec le fameux groupe de Casablanca. L’appel de SM le Roi procède d’une réelle volonté de paix des braves et est conforme à l’esprit d’ouverture d’un pays qui incarne un leadership incontesté sur les grands dossiers diplomatiques du continent, a-t-il ajouté. Dans le contexte actuel de la crise au Sahel et dans d’autres régions, a-t-il poursuivi, toute l’Afrique gagnerait dans cette synergie en tirant profit de l’influence de l’Algérie et du leadership et de la vitalité de la diplomatie marocaine sous l’égide de SM le Roi Mohammed VI, assurant que “notre continent a plus besoin de synergie que de divisions qui dispersent les efforts de développement”. “Cet appel s’inscrit dans la continuité et la constance des efforts du Maroc en faveur de la paix et du développement du continent dans un esprit d’un partenariat Sud-Sud renforcé. Il redonne l’espoir d’une renaissance d’un Maghreb désormais tourné vers l’avenir en parfaite conscience de ses liens indéfectibles avec la rive Sud du Sahara”, a-t-il conclu

Des centaines de milliers de pèlerins sont réunis dans la ville sainte de Touba, pour participer au grand Magal. Ce rassemblement annuel de la confrérie mouride, très influente dans le pays, célèbre le départ en exil de Cheikh Ahmadou Bamba, le fondateur du mouridisme. Au-delà des moments de communion au cours desquels les pèlerins assistent à des récitations du coran, Touba devient pendant deux jours, un lieu de rencontres entre politiques et religieux. Bakary Sambe, chercheur, auteur du Sénégal entre diplomatie d’influence et islam politique, répond à Bineta Diagne.

Cliquez ici Pour écouter l'émission : http://www.rfi.fr/emission/20181028-magal-touba-dela-evenement-religieux-est-moment-communion?fbclid=IwAR04rI7l_9a0q5QYg06l_6ZbQcWB3Iz-Bf8Nq3kg7OGwBfC4enthm3BF4ug

Arabie Saoudite, la guerre d’influence toujours ouverte en Afrique ? L’ouvrage de Dr. Bakary Sambe intitulé « Contestations islamisées : le Sénégal, entre diplomatie d’influence et islam politique » (Editions Afrikana, Montréal, Oct 2018) soulève encore un débat que l’on croyait clos mais sous d’autres aspects, parfois, les moins attendus. 
  
En son temps, la controverse politico-mdiatique sur l’envoi de 2100 soldats sénégalais pour combattre les « rebelles » chiites houthis au Yémen, en appui à la coalition pro-saoudienne, avait défrayé la chronique avec, d’une part une levée de bouclier de la société civile et de l’autre, des personnalités du courant wahhabite qui occupaient les médias pour soutenir une initiative finalement « avortée ».
  
Après avoir « froidement » analysé ces évènements « avec le recul du temps », l’ouvrage de Bakary Sambe révèle d’autres pans entiers de la « guerre secrète » entre l’Iran et l’Arabie Saoudite en Afrique dont le Sénégal semble être une « pièce maîtresse ». 
  
Des bourses d’études à de jeunes sénégalais pour se spécialiser sur la lutte contre « l’influence iranienne en Afrique » à l’Université du Roi Khaled, des séminaires de formation pour « contrecarrer les alliances entre confréries et chiites », une Université chiite au cœur de Dakar donnant la possibilité d’aller paracherver ses études à Qom en Iran. Rien que ça ? 
  
Pour Bakary Sambe, il est évident que « l’observation ordinaire de la vie diplomatique et l’approche juridico-institutionnelle dominante, négligeant les jeux d’influence, ne pourraient jamais détecter le grand jeu des deux puissances du Golfe sous nos tropiques ». 
  
Dans son nouvel ouvrage, l’enseignant chercheur au Centre d’étude des religions de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis lève un bon coin du voile sur une forme d’affrontement «idéologique » par « alliés » interposés. Dans ces « bonnes feuilles » que nous vous livrons, l’auteur révèle des faits assez peu connus sur ce qui se joue derrière le financement des mouvements islamiques et la manière dont les puissances du Golfe usent de leur influence pour peser sur la diplomatie d’un pays « souverain ». 
  
Le contexte historique en est bien campé par Bakary Sambe dans le chapitre où il explique : « l’Arabie Saoudite qui s’était, à peine, débarrassée du concurrent « laïque » égyptien, avec la disparition de Nasser de la scène politique arabe, devait, maintenant, éviter d’être devancée, dans la « conquête » idéologique de l’Afrique, par le nouveau venu qu’était l’Iran ». En plus des « réseaux Hezbollah de la communauté libanaise », assez influents dans l’économie et l’immobilier dans la capitale sénégalaise, « d’autres relais, avec des nationaux sénégalais, servaient la politique iranienne », révèle l’auteur. 
  
Comme si l’Arabie Saoudite, dans les années 80, savait exactement par où « attaquer » dans cette guerre d’influence : « pour contrecarrer cette fascination grandissante du modèle révolutionnaire iranien au sein de l’élite musulmane, il fallait déployer des moyens financiers colossaux et investir les terrains les plus « névralgiques » dans les pays africains à dominante musulmane : l’éducation et le social », rappelle l’auteur  des Contestations islamisées. 
  
Pour Bakary Sambe, « il était, surtout, nécessaire (pour l’Arabie Saoudite NDLR) d’encadrer cette politique par des structures imposantes capables de gagner la bataille de la communication ». Il est vrai que Ryad dispose de leviers importants tels que l’OCI et d’autres organisations connexes mais aussi la Ligue islamique mondiale qui « recrute » même au-delà des acteurs wahhabites et, précise Sambe, « mobilise au besoin les personnalités confrériques par pur pragmatisme». 
  
Au-delà de cette confrontation idéologico-politique, l’ouvrage de Bakary Sambe éclaire sur les mutations plus générales d’un contexte international où l’islam, en plus d’un levier diplomatique, devint un « catalyseur » et un moyen de donner du sens à « le semblant de sécularisation et l’absurde règle des intérêts nationaux » au cœur des « révoltes et des luttes ». Comme le soutient ironiquement Sambe, « de nos jours, suite à la disparition des idéologies gauchisantes, l’islam était comme devenu le nouveau syndicat unitaire des nouveaux « damnés de la terre ». 
  
Sur une approche encore plus factuelle, le directeur de Timbuktu Institute parle, dans son nouveau livre, d’une véritable stratégie par alliés interposés : « aujourd’hui, dans le contexte de la lutte d’influence au Moyen-Orient et face aux craintes saoudiennes partagées par le Maroc d’une expansion chiite en Afrique, il y a une véritable politique de sensibilisation face au « danger iranien ». 
  
Et à travers les pages de ce livre qui n’a pas fini de faire des révélations surprenantes, on voit comment différents acteurs sénégalais entrent dans le jeu des puissances du monde musulman et s’adonnent à une véritable « guerre » de communication. 
De temps à autres, de récents événements et décisions politiques sous Macky Sall trouvent une meilleure explication à la lumière de l’analyse de ce spécialiste qui, de l’avis d’un collègue universitaire, a « osé affronter son sujet, sans gants ni langue de bois ». 
Tenez vous bien ! le livre nous replonge sur l’affaire de l’envoi des soldats au Yémen et montre comment le débat opposait partisans de l’Arabie Saoudite et de l’Iran :  « la décision finalement abandonnée d’envoyer des soldats sénégalais à la rescousse de Ryad dans son aventure yéménite avait ravivé la tension entre partisans de Téhéran et de l’Arabie Saoudite comme Dr. Ahmad Lô dans un contexte d’émergence d’une communauté chiite sénégalaise endogène avec Chérif Mballo et Amadou Badiane comme figures emblématiques ». 
  
La révolution, dit-on souvent, se mène d’abord, dans les périphéries ! Le livre de Bakary Sambe, à travers une explicitation de la stratégie iranienne, semble aller dans le même sens, lorsque l’auteur soutient : « En fait, l’Iran a très tôt compris la difficulté d’exporter sa « révolution » au Sénégal et s’est déployé dans les régions périphériques Sud où l’islam confrérique a moins d’influence ». 
  
L’enjeu de la Casamance ? D’autres révélations avec des détails étonnants sont faites, dans ce livre qui défraye la chronique sur les stratégies d’implantation et de lutte d’influence entre ces deux « ennemis du Golfe » dans la région Sud du pays…. 

L'Islam a toujours été un levier diplomatique dans le sens où il a été constamment présent sur la scène internationale comme facteur important dont les Etats et autres acteurs se sont servis de différentes manières. Les confréries comme les mouvements islamiques  ont été au coeur des interactions entre les pays africains et le monde arabe par exemple. C'est le cas de la Tijaniyya dans les rapports avec le Maroc mais aussi d'autres confréries. Le mouridisme par son expansion à travers la diaspora sénégalaise en Europe et aux Etats-Unis en est même arrivé à une "institutionnalisation" progressive d'une diplomatie religieuse. Serigne Mourtada Mbacké qui sillonnait le monde afin de vulgariser les enseignements de Cheikh Ahmadou Bamba était même considéré comme "l'Ambassadeur du mouridisme". Des mouvements comme Hizbut Tarqiyyah sous l'égide de Serigne Atou Diagne ont une influence telle que les diplomates étrangers visitant Touba font de la visite de leur "daara" une étape incontournable. De même le leader du Dahira Mouqtafina, Serigne Moustapha Sy  fils du défunt Khalife Al-Amine de Tivaouane, descendant de Cheikh El Hadji Malick Sy a été parmi les premiers acteurs religieux a prendre part au programme américain des Visiteurs internationaux (IVLP) mais aussi "Egide" son équivalent français. 
La nouveauté est que les puissances occidentales se sont saisi de cet outil ou levier diplomatique qu'est l'islam pour en user pleinement dans un contexte sahélien plein d'incertitudes, tel que je le développe dans mon nouvel ouvrage : Contestations islamisées: le Sénégal, entre diplomatie d'influence et islam politique (Octobre 2018)   
Il est vrai que depuis plusieurs années maintenant, au Sahel, les logiques d'influence religieuse sont venues mitiger les logiques de puissance traditionnelle, n'en déplaise à ceux qui pensaient que leur supériorité militaire leur garantirait une hégémonie. 
Ce constat n'est pas véritablement nouveau. Bien avant l’intensification de la crise sahélienne, à partir de 2012, l’implication des monarchies pétrolières dans le financement des ONG islamiques avait déjà alerté sur l’expansion d’un islam radical et sur les risques induits. Depuis, l’influence de l’Arabie Saoudite et du Qatar ne s’est jamais démentie, même au plus fort de la crise malienne. N'a-t-il pas fallu l’intervention du Croissant rouge qatari pour que les convois humanitaires soient autorisés par les djihadistes à accéder à Tombouctou ? 
Aujourd'hui, cette influence saoudienne sur les systèmes éducatifs des pays du Sahel, avec des bourses d’étude et l’implantation des universités de Saï au Niger et du Sahel à Bamako, nuit à la cohésion sociale. Craignant une radicalisation rampante, le Maroc propose son offre de formation des imams maliens, nigériens et tchadiens, promouvant un islam tolérant au Sahel. Alger, qui dispose de plusieurs cartes dans les affaires nord-maliennes, a eu tôt fait de riposter en mettant sur pied une « Ligue des Oulémas du Sahel » recrutant de Dakar à N'Djamena, en passant Nouakchott, Niamey et jusqu’au Nigéria. L'une ou l'autre de ces initiatives a-t-elle permis de contrer l'influence de Riyad ? Difficile à dire. Mais au Sénégal, dans la ville nouvelle de Diamniadio si chère au président Macky Sall, sept hectares de terrain viennent d’être octroyés pour la construction d'une université régionale sous influence saoudienne par l’entremise du mouvement wahhabite, Dârul Istiqâmah. 
Au Sahel désormais, le facteur islamique est devenu un levier de politique étrangère et même les puissances occidentales ont fini par se « convertir » à la diplomatie religieuse. Paris l’a bien compris : en 2017, le président français Emmanuel Macron a « réhabilité » l’Arabie Saoudite sur le terrain sahélien en lui demandant son soutien financier pour le G5 Sahel (Riyad avait alors promis de contribuer à hauteur de 100 millions d'euros). La laïcité en bandoulière, les ambassades de France dans la région organisent désormais des cérémonies de rupture du jeûne du ramadan, pendant que le Quai d’Orsay offre des bourses de théologie aux étudiants accueillies dans les universités françaises. 
L’Allemagne, qui a fini par sortir sa timidité sahélienne en déployant plus de 650 soldats sous la bannière de la Minusma, a fait venir des chefs religieux au Bundestag pour parler de paix et de stabilité dès 2013. A Dakar, la mediasphère commente encore cette photo de l’ambassadeur des Etats-Unis et de son « mouton de l’Aïd » à l’approche de la Tabaski. Quant au programme des Visiteurs internationaux du département d’Etat américain (IVLP), il s’ouvre de plus en plus aux responsables islamiques de la région, toutes tendances confondues. Même Israël, afin de contourner l’islamisation du conflit qui l'oppose à la Palestine et au monde arabe, approche des imams et marabouts de la région, et les invite à Jérusalem pour promouvoir le dialogue interreligeux et la paix. 
Le cadre sahélien est ainsi marqué par les mutations d’un monde où circulent, sans frontières, des offres culturelles et spirituelles prenant leur revanche sur une sécularisation qui n’a pas affecté de la même manière les peuples du Sud et ceux du Nord. Les migrations et la volatilité des intérêts et des enjeux ont réussi à repositionner le religieux au centre des stratégies et des compétitions dans une région en crise où, en pleine angoisse existentielle, une jeunesse sans horizons est en quête de chance et sens. L’Occident est-il en train d’intégrer ce nouveau paradigme pour relativiser une modernité qui n’est pas forcément synonyme de sortie de la religion ? 

Bakary Sambe, Directeur de Timbuktu Institute (Dakar) 
Enseignant-Chercheur au Centre d'étude des religions ,Auteur de : Contestations islamisées: le Sénégal, entre diplomatie d'influence et islam politique (Octobre 2018)  

En mars 2018, Timbuktu Institute a rendu public son rapport sur Les facteurs de radicalisation dans les zones frontalières du Sénégal et de la Mauritanie, Rosso-Sénégal étant le champ d’investigation.
Dans ce rapport, l’équipe de Timbuktu a tenté d’explorer la possible corrélation éventuelle entre le phénomène de l’extrémisme et le déficit d’éducation qui caractérise souvent ces jeunes des régions périphériques.  En ce sens, l’enquête quantitative a constaté que 29% affirment n’avoir pas été scolarisés, et 47,3% le sont dans l’école française dite « occidentale. Enfin, le reste est ventilé entre les écoles coraniques et les autres dites « franco-arabes ».

L’enseignement religieux a un fort ancrage dans cette région, foyer important de la confrérie Tijaniyya et l’une des premières zones de pénétration de l’Islam dans le pays. À la question « Enverrez-vous votre enfant exclusivement à l’école coranique ? », 85% des parents répondent par l’affirmative. 65% y associeront la fréquentation de l’école publique comme c’est le cas, d’ailleurs, pour nombre de familles sénégalaises musulmanes. Ceci peut paraitre paradoxal dans le sens où la perception de l’école publique y reste largement mitigée sachant que seul le tiers des jeunes (33,4%) se dit « très satisfait » de l’enseignement public, et 43,3% d’entre eux se déclarent « moyennement satisfaits ». 

Le Burkina, longtemps préservé, est entré dans un cycle de violence jihadiste qui s'accélère avec des attaques incessantes et des zones d'insécurité de plus en plus grandes.

Le Burkina "est en train de perdre le Nord, dans les deux sens du terme", estimait une source occidentale dès le mois d'août. Elle pourrait désormais ajouter l'Est.

Attaques, enlèvements, explosions... Il ne se passe plus une semaine sans que les jihadistes ne fassent parler la poudre. Mercredi, 8 soldats ont perdu la vie en sautant sur un engin explosif artisanal (IED) dans le nord près de Djibo. Dimanche, trois gendarmes avaient été tués après le rapt d'un Indien, un Sud-Africain et d'un Burkinabè travaillant dans les mines d'or. Une double attaque dans des villages avait fait 9 morts dans l'Est le 15 septembre et la nouvelle explosion d'un IED en coûté la vie à deux soldats le 5.

Le mois d'août avait déjà été sanglant avec 13 personnes tuées par l'explosion de deux IED ainsi que la mort d'un douanier dans une attaque.

L'armée a perdu pied, incapable d'enrayer la spirale malgré des déclarations volontaristes mais sans effet du président Roch Marc Christian Kaboré.

La France, l'ancienne puissance coloniale de ce pays très pauvre, est très inquiète. "Jusqu'à la fin de Blaise Compaoré (président de 1987 à 2014, renversé par la rue) il y avait une garde présidentielle qui était la force armée principale, qui était entièrement dévouée à Compaoré et que Kaboré a sabordé complètement", souligne un haut responsable français.

"Derrière ça, il n'y avait quasiment rien, pas de culture militaire alternative. Il faut qu'ils constituent une armée digne de ce nom et cela prend du temps", ajoute cette source.

En plus de l'armée, Compaoré avait mis en place des réseaux qui étaient en relation avec les groupes jihadistes, ce qui a pu aider à préserver le pays, selon des sources sécuritaires concordantes.

"La situation s’est détériorée lentement. On a fonctionné dans une logique de déni. Comme si cela n’existait pas", estime Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute, qui souligne aussi que "l'instabilité politique" entre 2014-2015 (gouvernement de transition) n'a pas aidé alors que le pays avait à cette époque "largement le temps de développer une politique de prévention de l’extrémisme".

Le chercheur souligne "l’absence d’Etat", très peu actif dans le Nord et l'Est qui ne bénéficient que de peu d'infrastructures et services publics, une situation "toujours profitable aux groupes extrémistes".

- Contagion à d'autres pays -

Les groupes jihadistes l'ont très bien compris. "Faire fuir l’Etat fait partie de la stratégie pour que les populations adhèrent. Les populations n’adhèrent pas forcément au niveau idéologique mais elles ont un besoin de protection. Or, c’est un désert sécuritaire", explique M. Sambe.

Les jihadistes ont attaqué des gendarmeries isolées mais aussi des écoles ou des chefs religieux pour fragiliser l'Etat, tout en prêchant un "islam véritable". A l'image d'Ibrahim Malam Dicko, chef jihadiste burkinabè probablement mort en mai 2017 après une opération française, qui avait su s'attirer des sympathies locales auprès des populations les plus démunies.

Les groupes jihadistes se sont aussi adaptés à la surveillance et aux écoutes: "Il n’y a plus la logique de coordination des groupes, plus de commandement centralisé. Il y a une multiplication des fronts (...). Ils ont pour objectif la création de zones d’instabilité", précise M. Sambé.

L'armée n'occupe plus le terrain et cela facilite d'autant plus la pose d'IED. Rendant encore plus difficile les déplacements de soldats. Un cercle vicieux sans fin.

"Les IED vont se généraliser. Malheureusement ca va continuer et ne s'arrêtera plus. C'est facile à faire avec un peu d’explosif et des connaissances vues sur internet. Et, ils peuvent les poser à volonté!", souligne un ancien militaire français, qui prend l'exemple de l'Irak où les engins ont tué plus de soldats américains que les combats.

"Le Burkina est certainement un sujet de préoccupation. C'est une menace à extension régionale, avec des groupes qui franchissent les frontières et vont vers les régions de moindre pression sécuritaire", estime une source proche du gouvernement français

Pour Bakary Sambé, après le Nord, "si l’Est est pris, il y a le risque de débordement vers des pays qui étaient très éloignés de l’épicentre du jihadisme comme le Ghana ou la Côte d’Ivoire".

"Le Burkina constitue un verrou entre le Sahel et les pays côtiers, dans la lutte contre le terrorisme, s'il saute ces voisins seront atteints" a averti le ministre burkinabè des Affaires étrangères, Alpha Barry.

En partenariat avec le bureau de la Fondation Kondrad Adenauer à Dakar, Timbuktu Institue a mené une enquête de terrain sur les facteurs de radicalisation dans les zones frontalières du Sénégal (Vélingara) et de la Guinée (Labé), pour un rapport inédit qui sera rendu public avant le prochain Forum de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique.
Sur place, l’équipe de recherche a pu mener des enquêtes quantitatives et des entretiens qualitatifs. Au moment du dépouillement des questionnaires, deux éléments, déjà constatés dans nos précédents rapports dans d’autres zones, sont souvent revenus. Il s’agit d’un chômage de masse et d’un sentiment, partagé par la quasi-totalité des 400 jeunes enquêtés, d’être abandonné par l’État. A ce propos, rappelons que toutes les études que nous avons jusqu’ici menées ont montré que le chômage de masse était l’un des facteurs les plus importants dans la radicalisation des jeunes.

De ce fait les facteurs pauvreté et marginalisation se sont toujours greffés aux dimensions idéologiques du problème qu’il ne faudrait pas non plus négliger dans l’approche du phénomène de la radicalisation.

Rappelons qu’Omar Yaffa et Ibrahima Mballo, tous les deux, aujourd’hui, condamnés pour terrorisme et apologie de terrorisme, dans le procès Imam Ndao, viennent de Vélingara.

Dans le cadre des entretiens avec divers interlocuteurs, d’autres évoquent la question de l’insécurité dans une zone frontalière où le mouvement des hommes est difficilement contrôlable. En ce sens, le marché de Diaobé, un carrefour stratégique facilitant la circulation et la diffusion d’idées de la part de populations venant du Mali, de la Guinée et d’autres pays de la sous-région est un exemple des défis que pose la transfrontalité. Un administrateur de la ville, très préoccupé par cette situation ira même jusqu’à affirmer que cette zone marginalisée pouvait être considéré comme « une bombe à retardement ».

Un autre élément que le rapport permettra de constater est tout aussi inquiétant : c’est le choc des modèles religieux entre les chiites et les salafistes mais aussi, et surtout, entre salafistes et tidjanes qui peuvent parfois donner lieu à des confrontations.

Dans le cadre du dispositif PISCCA et l’initiative de prévention de la violence par l'éducation aux valeurs citoyennes, Timbuktu Institute-African Center for Peace Studies qui développe actuellement des initiatives en direction des jeunes  dans plusieurs villes du Sénégal a reçu la visite d’une délégation Ministère français de l’Europe et des Affaires étrangères venu, s’enquérir de l’avancement du projet. Cette délégation était composée de M. Emmanuel Puisais-Jauvin, directeur général adjoint de la Mondialisation et de Madame Hélène Ferrer, rédactrice éducation, formation professionnel et jeunesse à la même direction au Quai d'Orsay.

Monsieur Laurent Perez-Vidal, Conseiller de Coopération et d’Action Culturelle) et Mme Coralie Nkuka, Chargée de mission Société civile et Volontariat au Pôle de la Coopération Non Gouvernementale de l’Ambassade de France à Dakar ont également pris part à cette rencontre d’échanges sur les actions de l’Institut au Sénégal et en Afrique, de manière générale mais, aussi, plus spécifiquement, les différents volets du Projet PISCCA. 

Comme l'a rappelé le directeur de l'Institut, l’un des objectifs généraux du PISCCA est d’accompagner, le développement des principes de redevabilité et de transparence dans l’action publique, de promotion des droits humains et de plaidoyer pour le climat. Au Sénégal 15 projets ont été soutenus, par l’Ambassade de France, dans le cadre de ce dispositif qui motive surtout les initiatives innovantes des sociétés civiles et des coalitions d'acteurs.

Lors des échanges avec la délégation française, Timbuktu Institute a présenté la bande dessinée éducative qu'elle a conçue à destination des jeunes pour la prévention de la violence dans le sport et la promotion des valeurs citoyennes par l’implication de la société civile, des médias locaux et l’accompagnement des efforts de l’Etat dans ce sens.

Le lancement officiel de cette bande dessinée se fera à l’occasion de l’ouverture des Sessions de formation, prévues par le PISCCA, sur la promotion de la citoyenneté et de la culture de la paix en présence des autorités sénégalaises. Selon le Directeur de Timbuktu Institute, « ce sera l’occasion de renforcer l’implication des autorités et des acteurs de la société civile pour mieux accompagner les initiatives citoyennes portées par les jeunes eux-mêmes ».

La délégation française s’est félicitée de toutes ces initiatives et a salué les efforts de l’Institut dans le cadre de ce « partenariat constructif » autour d’actions et d’initiatives « innovantes » rendues possibles grâce au PISCCA.

Bakary Sambe a, dans le même sens, appelé à ce que « ces initiatives soient une opportunité d’un renforcement des relations d’échanges entre l’Institut et des acteurs et structures partageant les mêmes objectifs en France notamment dans le domaine de la prévention de la violence des jeunes qui n’épargne, aujourd’hui, aucune société et qui nécessite une coopération de plus en plus décentralisée rappelant que plusieurs membres de l'Institut ont déjà participé à des rencontres à Lyon, Biarritz et Paris pour partager leurs expériences avec des acteurs et organisations français travaillant sur ces mêmes questions



Investi dans sa mission de veiller sur la hadra et son patrimoine matériel comme immatériel depuis l’âge de 17 ans, celui que tous, à la suite de son homonyme, Cheikh El Hadji Abdoul Aziz Sy Dabakh, finirent par appeler « le digne de confiance », Al-Amine, est l’une de ces rares personnalités qui ne se contentent pas de marquer seulement leur époque. Ils la façonnent ! 
La spécificité de la personnalité de Cheikh Abdoul Aziz Sy Al-Amine est que chacun croit mieux le connaître que tout le monde, tellement il savait personnaliser les relations qu’il entretenait avec les gens au point d’induire certains vers l’impression de le posséder totalement alors qu’il était le patrimoine de tous. 
C’est Sahykh Ahmad Sukayrij qui parlait de Cheikh El Hadji malick Sy en le définissant comme le « legs béni des anciennes aux futures générations » (Barakatu Salafi fil Khalaf) dans son célèbre ouvrage sous le titre de (Jinâyatul ). Serigne Abdou semble s’inscrire dans cette même tradition de perpétuation et surtout de sauvegarde du patrimoine dont il faisait finalement partie, au point que le Pr. Mbaye Thiam de l’EBAD, l’appelait « le gardien du temple ». C’était en ces moments forts de la vie d’une hadra où l’on attendait la consigne libératrice après tant d’heures de réflexion et de concertation de la part de celui qui, par sa lucidité, pointait le doigt de la guidance vers la meilleure solution. Meilleure parce que toujours juste, réfléchie, et en toute connaissance de cause mais surtout conforme à l’héritage auquel il était si « jalousement » attaché ! Mais c’était une fidélité au message parfaitement inscrite dans l’action et le « mouvement » comme dirait un certain Mohammed Iqbâl. 
Al-Amine aura été le guide qui, à un moment où la vieille tradition pouvait éloigner les jeunes de la totale implication dans la vie confrérique exotérique comme ésotérique, a eu l’idée d’en rajeunir les structures et de mettre la jeunesse au cœur la Tarîqa. 
C’est cet élan de rénovation fidèle à l’essentiel qui a donné naissance à une « jeunesse malikite », au mouvement « Mouqtafîna » et bien avant, l’esprit qui généra tant d’autres organisations comme la Dahiratoul Moustarchdina Wal Moustarchidaty et la Cellule Zawiya Tijaniyya etc.. Décidément, Al-Muharram finit par être son mois pendant lequel le plus grand regroupement de la jeunesse s’est toujours effectué. Même en son « absence », ce sera toujours son inspiration qui devrait nourrir les ambitions d’une jeunesse devant d’énormes défis et responsabilités. 
S’entretenir avec Al-Amine, après de longs moments de recherche de solutions et d’initiatives dans tous les sens finissait par être un court instant de bonheur partagé pour l’éternité; tellement les vérités les plus sincères et les critiques les plus constructives étaient formulées, de sa part, dans un style et un langage, certes, pleins de franchise mais aussi, toujours, d’affection paternelle. 
C’est Serigne Cheikh Ahmed Tidiane Sy Al-Maktoum qui enseignait que « les confréries sont des clubs mystiques où se forment continuellement les athlètes de la religion ». En revisitant, Al-Fayyâdh,  l’ouvrage d’Al-Amine regroupant ses différents discours et conférences tenues à travers le monde, on peut dire que Serigne Abdoul Aziz Sy a su, par une pédagogie différenciée, didactiser cet enseignement en leçons de vie, en éternel viatique pour donner corps à l’esprit de la Himma (volonté d’action), plier essentiel de la Tarbiyya Tijaniyya. 
On se souvient, lors de nos Ziara dans le fameux « salon » qu’il nous disait « ne me présentez plus de projets, venez avec des bilans et des résultats » ! 
En fait, l’homme qui a parcouru le monde musulman, l’Europe et l’Amérique au service de sa mission qui n’a jamais varié, avait senti qu’il fallait booster une jeunesse qui le prenait pour modèle et à laquelle il fallait, vite, transmettre l’esprit de l’action comme philosophie de vie menant à la réalisation spirituelle. Une méthode collant parfaitement à la démarche de la Tijâniyya exigeant, bien que Tarîqatu Shukr, une double excellence spirituelle et temporelle afin que la « reconnaissance des faveurs » rime avec mérite dans l’humilité. 
Le souvenir est encore vivace des moments décisifs de la mise ne place du Forum national de la Tijaniyya en France ou encore du Symposium du Mawlid, du regroupement annuel de la jeunesse tidiane malikite, des diverses actions du COSKAS et tant d’autres instants qui ont façonné le tournant décisif qu’Al-Amine a su donner à la vie de la Hadra. Il est sûr qu’en procédant à l’inauguration de la Zawiya Tijaniyya de New York, tous les esprits se tourneront vers cet infatiguable bâtisseur, cet éducateur indulgent et rigoureux à la fois. On ne saurait comment ! 
La personnalité de cet « absent » le plus présent dans l’esprit des jeunes de la Hadra était multidimensionnelle au point que tous se le disputaient alors qu’il savait recevoir chacun et lui parler dans le langage qui sied. Serigne Abdou savait « rester digne en étant populaire » mais surtout, il était capable de « rester peuple en conseillant les rois », si on en était arrivé à paraphraser R. Kipling pour illustrer ce témoignage. 
Dans un bus vers l’Aéroport de Casablanca, la radio nationale du Maroc annonce une audience solennelle entre le Roi du Maroc et Cheikh Abdoul Aziz Sy Al-Amine, représentant de la famille d’El Hadji Malick Sy dans les dorures du palais qui ne l’impressionnaient pas; car une semaine après, on pourrait le retrouver, dans son humilité et sesn du devoir, à Yeumbeul, Kaolack, Mbour, ou « simplement » assis, au milieu de centaines  de jeunes, dans un stade de la banlieue dakaroise pour une wazifa. Acte symbolique de la Tarîqa qu’il a complètement vulgarisé dans le sens d’une sage expansion des enseignements ! 
Les critiques littéraires arabes parlent souvent de « Sahl al Mumtani’ » pour vanter la beauté d’une sublime prose, en apparence facile d’accès, mais difficile à cerner. On pourrait appliquer un tel paradigme dans l’approche que tout analyste aurait eu de la vie et de l’œuvre d’Al-Amine.
  
L’actualité brûlante est aussi pleine de moments qui nous font penser à ses déclarations et appels à la retenue lorsque le pays se trouvait dans des contextes plus ou moins critiques. En plus de son rôle de « régulateur social » qu’il jouait lors des grandes crises politiques, Serigne Abdoul Aziz Sy Al-Amine, alors khalife général des Tidianes, et même bien avant, arrivait à saisir les opportunités et les moments de grande écoute pour développer un discours relevant plutôt de l’avertissement ou de « l’alerte précoce » à la manière des prospectivistes « profanes ». 
Sa profonde connaissance du milieu et de la classe politiques lui permettait de s’adresser aux différents acteurs de l’opposition comme du pouvoir en toute liberté de ton. Au cours d’une entrevue avec lui, à Tivaouane, après nous avoir demandé quelle était notre spécialisation (la science politique), il nous dit en des termes assez sérieux : « nul ne connaît la politique sénégalaise mieux que moi ». Il faut dire qu’il a été impliqué dans nombre de réconciliations et de négociations à chaque fois qu’une crise majeure risquait de mettre à mal le fameux « contrat social sénégalais ». 
  
Lors des obsèques à la suite de la disparition de Cheikh Ahmed Tidiane Sy Al-Maktoum à laquelle toute la classe politique ainsi que les représentants des partis avaient assisté, il leur lança : « Si vous n’arrêtez pas vos querelles, le pays basculera dans la guerre civile. (…) Ce que je vois venir n’augure rien de bon. Et vous n’aurez plus de temps pour vos partis politiques. Car, celui qui vous tuera sera à vos côtés. Mieux vaut donc arrêter vos querelles, sans quoi notre pays en sera détruit.» (cf. Journal, l’Observateur n°4046 du lundi 20 mars 2017 pp. 1 et 5) 
  
Ces propos prononcés dans le contexte d’un climat politique tendu prenaient tout leur sens dans un contexte où il appelait à l’apaisement et à la sérénité. Le style d’un tel discours rappelle, sur nombre de ses aspects, un appel à la « raison » et à l’apaisement du climat politique par des directives pour plus de concorde et de cohésion. D’ailleurs, Serigne Abdoul Sy Al-Amine et Serigne Cheikh Sidy Mokhtar Mbacké, défunt Khalife général des Mourides ont marqué le champ sociopolitique sénégalais par leurs appels à « l’unité » et à la « concorde » au point que leur khalifat a symbolisé un esprit de « cohésion » jamais retrouvé depuis celui de Cheikh Abdoul Aziz Dabakh, décédé en 1997. 
  
C’est dans ce sens qu’un hommage Al-Amine, par les temps qui courent, ne peut pas omettre le sentiment profond de regret d’un homme de paix, de conciliation et de concorde. 
  
Bakary Sambe 
Membre de la Cellule Zwiya Tijaniyya 
Co-Fondateur du Forum National sur la Tijaniyya en France 

Dans la continuité de sa démarche consistant à impliquer les autorités publiques dans ses réflexions, recherches et actions, Timbuktu Institute a procédé à la présentation du Projet Innovant des Sociétés civiles et Coalitions d’acteurs (PISCCA) au préfet de Dakar, Alioune Badara Sambe, ce mardi 4 septembre 2018. D’ailleurs, c’est le préfet, lui-même, qui a fait l’amitié, à l’équipe de Timbuktu, en se déplaçant pour la présentation du projet et, en même temps, visiter l’institut. 
La rencontre fut chaleureuse et cordiale. Elle a été l’occasion, pour l’équipe de Timbuktu Institute, de discuter avec le préfet de Dakar de la situation sécuritaire du pays et, de la commune dont Monsieur Alioune Badara Sambe assure le maintien de l’ordre public. 
Sachant que le milieu sportif, notamment pendant les Nawétane et combats de lutte, connaît une violence régulière, le préfet a salué et positivement accueilli ce projet qui venait de lui être présenté et a fait part de sa disponibilité et volonté d’accompagner l’équipe de Timbuktu dans son exécution.
Rappelons que le projet PISCCA, soutenu par l’Ambassade de France au Sénégal, est porté par Timbuktu Institiute. Son objectif est, par le biais du sport, de sensibiliser les jeunes aux valeurs citoyennes et démocratiques mais aussi à la lutte patriotique contre toutes sortes de violences. 
Le projet, qui comprend des ateliers de sensibilisation et de formation ainsi que des tournois de foot, sera exécuté à Dakar, Mbour, Kaolack et Saint-Louis.