Tchad : Le gouvernement de transition veut-il s’inscrire dans la durée ? Spécial

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Dans une logique de consolidation du régime en place, le président de la transition du Tchad, Mahamat Idriss Déby, continue de prendre des mesures pour apaiser le climat sociopolitique. A cet effet, 380 rebelles du Front pour l’Alternance au Tchad (FACT), condamnés en premier ressort à perpétuité au mois de mars, ont été libérés le 5 avril par grâce présidentielle. Cette grâce survient sept mois après la remise en liberté d’une dizaine d’opposants ayant participé aux manifestations d’octobre 2022 contre le régime en place.

Par ailleurs, selon certains indices, le torchon semble brûler entre N’Djamena et Berlin. En effet, l’ambassadeur d'Allemagne au Tchad, Jean-Christian Gordon Kricke, a été sommé de quitter le territoire tchadien sous 48h dans un communiqué datant du 7 avril pour "attitude discourtoise" et "non-respect des usages diplomatiques".

En réalité, l’ambassadeur allemand est accusé d’ingérence dans les affaires intérieures du pays, en évoquant la lenteur du régime militaire à organiser des élections qui redonnent le pouvoir aux civils et en critiquant l’impunité dont jouit les autorités de transition à la suite des manifestations meurtrières de l’opposition en 2022 qui avaient fait plus d’une centaine de victimes. Par mesure de réciprocité, et n’ayant pas d’explications sur les faits reprochés, le ministère allemand a notifié dans un tweet avoir convoqué et prié l’ambassadrice tchadienne à Berlin, Mariam Ali Moussa, de quitter l’Allemagne. La tension n’est pas prête de redescendre même si les autorités tchadiennes tentent d’assurer que les relations entre les deux pays restent intactes.

Pendant ce temps, l’administration, les ONG et les journalistes intervenant dans la région du Lac, précisément dans le sud-ouest sont formels sur le fait que Boko Haram a changé de mode opératoire. Les combattants opéreraient la nuit en petits groupes afin d’éviter l’armée tchadienne. Ils auraient même changé de cibles : "Boko Haram a changé ses méthodes d'action". Ils ont commencé par "enlever les personnels de l'État ou des ONG pour les échanger contre des rançons", nous informe Adoum Mahamat Mbomi, préfet de Fouli, département situé dans la province du lac Tchad, "(...) Des jeunes garçons et des jeunes filles aussi. Parfois, ils s'échappent à Boko Haram. D'autres sont échangés contre rançons, et il y en a qui sont gardés comme combattants", poursuit-il.

Face à cette situation d’insécurité, combinée aux inondations qui ont frappé toute cette région et devant l’impossibilité de prendre en charge les 45000 personnes déplacées, les forces vives de la région du lac Tchad se sont réunies autour d’ "un Forum contre la nébuleuse Boko Haram", demandant au gouvernement de multiplier les bases et patrouilles militaires et d’armer les chasseurs du coin.

Plus loin dans le centre du pays, un conflit intercommunautaire fait 14 morts. Les faits se sont déroulés dans la localité de Mangalmé, Province de Guera dans le centre du Tchad. Un vol de bétail est à l’origine de ces violences. Le Gouverneur de la Province et les forces de défense et de sécurité ont réussi à appréhender les voleurs présumés. L’Action Humanitaire Africaine (AHA), ONG militant pour la défense des droits humains, demande une réponse du gouvernement tchadien face à ces tensions récurrentes. D’autant plus que, 11 personnes ont également été tuées suite à un autre vol de bétail, cette fois-ci dans le village de Mankadé situé dans la sous-préfecture de Laramanaye et 17 autres personnes tuées dans la zone de Logone orientale, dans un village. Sur le banc des accusés, figure des Tchadiens venus de Centrafrique.

Avec la coopération signalée des soldats centrafricains suite à la mise en place de "l’action militaire conjointe" par les états-majors des deux pays, une opération militaire inédite a été lancée par l’armée tchadienne qui a réussi à tuer une dizaine de voleurs. Le général assure que les soldats tchadiens sont rentrés au Tchad avec 30 prisonniers et 130 bœufs volés. Les présidents Faustin Archange Touadéra et son homologue Mahamat Idriss Déby "ont pris cette décision ensemble pour éradiquer les banditisme de chaque côté de la frontière", assure Bangui Fidèle Gouandjika, ministre conseiller spécial du président centrafricain à l’AFP.

Malgré "l’opération conjointe", une nouvelle attaque qualifiée de "massacre d’une grande cruauté" s’est produite le 17 mai au matin et a fait 26 victimes et plusieurs blessés tout près de la frontière centrafricaine et ce, sur le dos de l’armée tchadienne. Une opération militaire conjointe lancée par les militaires tchadiens et centrafricains contre des bases de ces "bandits" a permis de ramener les bœufs volés, et occasionné des blessés et des morts. Le ministre tchadien de la défense rassure que les populations vont enfin souffler grâce à cette opération militaire conjointe. Ses propos ont également été confirmés par le président centrafricain à Radio France International (RFI).

 

Source : Météo Sahel Timbuktu Institute

 

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